dimanche 30 septembre 2007

LA DEFAITE EN CHANTANT


Comme les autres livres de Claude Allègre, celui-ci se lit comme un roman. C’est écrit dans le style d’une conversation, avec Dominique de Montvalon. Dans un langage clair et direct –le contraire de la langue de bois- l’auteur raconte l’histoire, petite ou grande, des dernières présidences et de la dernière campagne électorale.
Chaque page comporte son lot de réflexions instructives, on ne peut pas les citer toutes, il faut lire ce livre, c’est un régal.
Quelques extraits :

L’Egalité et la gauche.
« La première rupture pour la gauche aujourd’hui, c’est d’abandonner l’idée que l’égalité, c’est l’uniformité. »
(Cette idée de Claude Allègre me rappelle une réflexion –inverse et paradoxale- répandue chez certains enseignants : ‘’ Les ZEP, donner davantage aux élèves en difficulté, c’est CONTRAIRE A ‘EGALITE REPUBLICAINE. ’’ ! ! ! ! )

Chevènement, Jospin et la Corse.
Après l’assassinat du préfet Erignac, « la consigne, c’était plus que jamais la fermeté. Jean-Pierre Chevènement était bien sûr d’accord avec cette ligne. Et il avait les pleins pouvoirs pour la mettre en œuvre. Simplement, Chevènement aime les grands discours, mais, à la longue, on s’aperçoit que c’est de Gaulle dans le discours et Guy Mollet dans l’action, comme dit une personne qui le connaît bien. »
Avec 5% de voix, JP Chèvenement aura contribué à l’échec de Lionel Jospin en 2002.

Les 35 heures et Martine Aubry en 1986.
Il est question d’un congrès de la CFDT en 1986 animé par Nicole Notat.
« Martine Aubry, invitée à ce congrès là et à l’époque directrice des Ressources humaines de Péchiney, était venue à la tribune, et avait expliqué très officiellement que les 35 heures, c’était une ânerie. »

Les 35 heures, en 1997.
« Jospin dit ‘’ les 35 heures, c’est Martine qui va les faire.’’ »

Les 35 heures et les fonctionnaires.
Reporter à plus tard le problème pour les fonctionnaires, « c’était une erreur. Si on avait abordé les discussions sur la durée du travail dans la Fonction publique dès 1997, cela nous aurait permis de faire avancer bien des problèmes.
DdeM : Vous pensez à quoi, par exemple ?
Dans l’Education Nationale, au fait que les agrégés n’enseignent que 15 heures, et les certifiés 18. Alors qu’ils font, face aux élèves, le même travail. On aurait pu aussi aborder la question de l’aide aux élèves en difficulté à inclure dans le temps de travail. . . .»
Le problème –des horaires-a été abordé « en 2001, dans la précipitation. Et Jospin a alors donné aux fonctionnaires ce qu’il refusait même de discuter en 1997. Il a donc une responsabilité personnelle dans ce que je considère comme un fiasco : la RTT, la déstabilisation de l’hôpital et tutti quanti. »
Claude Allègre expose ses idées sur les effets positifs (création d’emploi, avancée sociale) et négatifs des 35 heures, et sur les heures supplémentaires.
« Il s’est ajouté à cela la mesure idiote et injuste –je pèse mes mots- de limitation des heures supplémentaires. »

Claude Allègre et Ségolène Royal. Avant la candidature.

C’est Claude Allègre qui a proposé à Jospin de prendre dans son ministère comme secrétaire d’état, Madame Royal. Mais celle-ci veut être Ministre Déléguée, et non pas Secrétaire d’Etat. Claude Allègre : « . . . Je suis revenu auprès de Jospin et je lui ai dit : ‘ Mets la ministre déléguée ‘. Il m’a dit : ‘ Si tu veux, mais tu t’en mordras les doigts’ »

Eric Besson « dépeint Ségolène exactement comme je l’ai connue : égotique, impatiente, inconstante, incompétente. Oui, vraiment intéressée par une seule chose : elle-même. »

BdM : « Est-elle la fille politique de François Mitterand ? »
C.A. : « Oui. Elle le croit. Elle pense même être sa réincarnation. C’est son côté mystique. Ne dit-elle pas : ‘ Je suis habitée ‘ ? »

« . . . J’ai la conviction que Ségolène est excellente en communication politique, médiocre sur le fond et tellement mégalo. Mais idiote, non, alors pas du tout ! »

Ségolène voulait promulguer « une circulaire qui prévoyait que tout enseignant accusé de pédophilie était automatiquement suspendu ». Alain Etchegoyen, membre de son cabinet s’y oppose. Réponse « fantastique » de Ségolène à Etchgoyen, « stupéfait et indigné : ‘ Un enfant ne ment jamais ! ‘ »

. . . Ses idées quand elle était ministre ? « Déjà, elle disait : ‘ Des idées, donnez m’en. Je les ferai appliquer’. Mais sa réflexion propre était aussi creuse qu’aujourd’hui. »

Claude Allègre et Ségolène Royal., candidate.

« Je vais vous donner, psychologiquement, ma définition du ‘royalisme’ : ce sont des gens dont l’ambition dépasse de beaucoup les compétences et qui l’assument en toute lucidité. »
Il y a heureusement quelques exceptions, JL Bianco par exemple.

Claude Allègre rapporte Les déclarations de Ségolène en Chine :
«’ Les chinois sont formidables, lance-t-elle, ils ont une justice rapide. On pourrait prendre modèle sur eux ‘ . »

« Puis dans une allocution officielle, elle déclare : ‘ Nous allons vous aider à vous développer ‘ . Les Chinois en rient encore. »

BdM : Les militants « pensent plus que jamais que l’avenir passe par elle . » ( par Ségolène).
C.A. « Absolument. En plus, c’est peut-être vrai, car Ségolène a une ambition tenace. Le PS ne s’en débarrassera pas facilement. »
« elle a du charisme, et, oui, elle suscite une forme de ferveur.
. . . Elle sent surtout qu’elle domine tous ces hommes qu’elle méprise, puisqu’ils l’avaient prise pour une sotte. C’est la nouvelle Jeanne d’Arc. . . . Elle est la madone. »

BdM : « Ségolène, dites-vous, a ses chances . . .
C.A. Ce serait une rude erreur de la sous-estimer. Elle va rebondir. Elle a pour elle un indéniable capital de sympathie chez beaucoup de militants. . . . Oui, elle peut gagner.
C’est une femme de vrai pouvoir. . . .

Ce qui est plus préoccupant, c’est que Ségolène ait montré ses limites et qu’on la voie enfin sous son vrai jour, comme une femme décidée à tout pour satisfaire son ambition, sans références excessives à l’éthique ou à la morale. »

Claude Allègre et le socialisme.

« La gauche a longtemps pensé que l’entreprise était un lieu d’exploitation des travailleurs, et elle a fustigé le rôle du chef d’entreprise. C’est une erreur profonde.
. . .
Ne tournons pas autour du pot, il faut réformer le système des retraites et de l’assurance maladie. En ce sens, la réforme Fillon constitue bien un premier pas courageux. Ce qu’aurait dû faire Jospin.
. . .
Ce qui est irresponsable, c’est d’avoir inscrit dans le programme du PS l’abrogation des décrets Fillon.
. . .
Tout comme était idiote l’idée de renationaliser à 100% EDF et de rembourser les 7 Milliards d’Euros aux souscripteurs.

En politique, il faut des gens compétents et divers. Or, dans la direction actuelle du PS, il y a trop de gens qui n’ont jamais travaillé, qui n’ont pas de vrai métier. »

Lisez ‘’ La défaite en chantant’’. Vous ne le regretterez pas.

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